L’église

1964 – Église de Vauxrenard, avant sa restauration récente

Origine de l’église romane « Saint Martin de Vauxrenard »

Sans qu’il n’y ait de textes précis, on peut avancer que cette église a été édifiée fin du XIème siécle, début du XIIème siècle par les moines bénédictins de Solagny à la commande des seigneurs de Sainte Colombe qui faisaient aussi construire à cette époque le château du Thil. Nous avons d’ailleurs retrouvé dans le croisillon sud du transept les traces des armoiries de Sainte Colombe.

Certaines caractéristiques confirment cette datation :

  • à l’intérieur, les voûtes, en arc brisé, et la coupole oblongueet hexagonale rappellent les techniques très évoluées de Cluny III
  • à l’extérieur, le clocher, massif et robuste, avec ses fenêtres doubles (géminées)et les deux colonnes engagées du chevet évoquent l’église Saint Nicolas de Beaujeu. Or, celle-ci aété consacrée le 13 février 1132 par le pape Innocent II, accompagné de Pierre le Vénérable, le dernier des grands abbés de Cluny. Vauxrenard (Vallis Regnardi) était à cette époque un important archiprêtré dont dépendaient 38 paroisses, jusqu’aux porte de Mâcon.

D’importantes transformations ont été réalisée en 1840 pour en accroitre les dimensions en remplaçant les murs du transept par des colonnes et en repoussant les murs de chaque coté pour créer deux rangées latérales supplémentaires. Malgré ces transformations elle garde son chœur et son clocher du style roman au charme indéniable.

Le clocher et ses cloches

Partiellement détruit par la foudre en 1823, le clocher à été restauré en 1840, « après avoir numérotées et descendues toutes les pierres du coté ouest« .

Cette ouverture a permis d’introduire dans le clocher deux cloches en remplacement d’une petite qui était cassée et a cessé de sonner le matin du 19 août 1840. A cette époque, pour rythmer les heures il n’y avait que la cloche de l’église et… le chant du coq.

  • La plus grosse (en La) pèse 776 kg et son battant 29,4 kg
  • La plus petite (en Do) pèse 403,5 kg et son battant 18,8 kg

Elles ont été baptisées en 1841 et on leur a donné un prénom : Geneviève et Mathilde, car elles sont considérées comme des personnages !

L’ancienne cloche, qui datait de 1674 portait l’inscription suivante : « Vox mea sanctorum sit terror Desmoniorum« , c’est à dire : « Que ma sainte voix soit une terreur pour tous les dangers » !

Le clocher hébergeait jadis de très longue date l’Effraie des clochers, ou Dame Blanche en langage populaire, (Tyto alba) qui trouvaient là un nichoir tranquille et à sa hauteur. Nullement gênée par le son des cloches elle pouvait s’y reproduire chaque année.

Le clocher, aujourd’hui soigneusement grillagé et constamment éclairé la nuit, a fait fuir ces oiseaux qui désormais n’existent vraisemblablement plus sur la commune de Vauxrenard. C’est bien dommage… En lieu et place on consomme de l’électricité pour éclairer l’église alors que tout le monde dort, sauf les oiseaux de nuit qui eux ne supportent pas la lumière !

Quand sonnent les cloches ?

Les clochent sonnent traditionnellement pour les évènements importants rythmant la la vie des paroissiens : offices et cérémonies religieuses mais aussi les évènements civiles comme les déclarations de guerre, les armistices, les incendies… La grosse cloche n’était sonnée que pour les fêtes, pas pour annoncer les offices ordinaires.

Aujourd’hui les cloches sonnent pour annoncer:

  • la messe, un quart d’heure environ avant le début de l’office
  • les baptêmes
  • les mariages religieux
  • les obsèques (le glas)

Pour les baptêmes et mariages, les cloches sont sonnées « à la volée » par les paroissiens eux-même, sans rituel précis, au grand plaisir de ceux qui participent aux offices, notamment les enfants.

Pour les obsèques, le glas est sonné à la demande la famille, une fois lors de l’annonce du décès, une autre fois lors de l’arrivée du cercueil et une lors de sa sortie de l’église. Les cloches ne sont pas tirées à la volée, mais selon un rituel précis : un coup alterné d’une cloche puis de l’autre, en commençant par la petite cloche pour le décès d’une femme et la grosse cloche pour un homme. Une dizaine de coups de chaque cloche est ainsi égrené. Jadis, le glas était sonné 3 fois par jour, de l’annonce du décès au jour de l’enterrement.

Concernant les actes civils , les cloches ont sonné pour la déclaration de guerre en 1914 et en 1939, ainsi que pour la signature des armistices en 1918 et 1945.

Lors des incendies, les cloches sonnaient le tocsin pour informer les habitants du sinistre. Elles remplaçaient en cela la sirène installée plus tard sur le toit de la mairie. Le tocsin fut sonné la dernière fois en 1982, lors de l’incendie de la maison située à l’entrée du village. L’alimentation en électricité de la sirène ayant été coupée, le feu avait fait tomber le poteau électrique qui alimentait la mairie !

Le marguiller

Jadis, le marguiller, aussi dénommé fabricien, désignait toute personne membre du Conseil de fabrique, conseil chargé de l’administration des biens de l’église et de son budget de fonctionnement. Le Conseil de fabrique a été dissous en 1906 suit à loi concernant la séparation des Églises et de l’État adoptée le 9 décembre 1905.

Jusqu’en 1955 les cloches étaient sonnées par le curé de la paroisse. Aujourd’hui, le marguiller désigne celui à qui l’on s’adresse pour sonner les cloches, et qui notamment sonne le glas lors des enterrements.

Les marguillers de Vauxrenard : Lucien Guérin de 1955 à 1968 et depuis c’est Gaston Patissier.

Église de Vauxrenard, la nef principale

L’électrification des cloches

En 2019, suite aux difficultés rencontrées par le marguiller (Gaston Patissier) pour sonner le glas lors des enterrements (il faut lancer puis bloquer le balancement des cloches), le Conseil Municipal de la commune a voté un budget pour « électrifier » les cloches.

Électrifier le « coup par coup » pour sonner le glas à la demande des familles est tout à fait possible et facile à réaliser. Le système mécanique est assez simple : un marteau mécanique frappe les cloches avec une commande électrique. Cette électrification seule règle le problème posé par le marguiller.

Par contre électrifier “la sonnerie à la volée” est plus compliqué et nécessite de détruire partiellement le système ancien de balancement avec les cordes. Cette électrification n’est pas nécessaire. En effet, elle est totalement inutile pour les raisons suivantes :

  • il n’est pas difficile de balancer les cloches avec les cordes. Les enfants peuvent le faire sans difficulté, et à leur plus grande joie, pour les baptêmes, mariages, et autres offices religieux !
  • ce système fonctionne très bien depuis 180 ans !
  • il ne nécessite pratiquement aucun entretien,
  • personne ne demande à modifier ce système, et notamment pas le marguiller que nous avons interrogé.

Par ailleurs, son électrification pose de gros problèmes :

  • elle nécessite la destruction des roues solidaires des cloches qui sont  actionnées par les cordes,
  • cette destruction est une atteinte au patrimoine historique du clocher classé aux monuments historiques. Elle ne peut pas être réalisée impunément sans étude préalable sérieuse et dument justifiée,
  • elle prive les paroissiens de ce geste symbolique de « tirer sur les cordes » pour sonner les cloches les jours de fête. Vauxrenard peut s’enorgueillir d’être l’une des dernières communes dans laquelle on peut encore « tirer les cloches ».  Préservons ce privilège !
  • elle est coûteuse…
  • elle est fragile, et nécessite une programmation qui sera soumise aux risques de panne par coup de foudre ou surtension, donc avec une maintenance permanente (quel sera le coût d’une intervention des spécialistes ?)
  • elle peut être dangereuse : des moteurs électriques fixés sur des poutres de 180 ans peuvent déclencher un incendie en cas de court-circuit (le dernier incendie du clocher date de 1823 suite à un coup de foudre),
  • En cas de panne, il sera impossible de sonner les cloches, le système ancien étant détruit et rendu inopérant,
  • la durée de vie du système informatique est ridicule par rapport à celle du système mécanique ancien…

Mais malheureusement, M. Salanson, Maire de Vauxrenard, n’a pas tenu compte de ces éléments et a fait électrifier complétement de système de balancement en 2019…

Les statues en bois doré

L’ancienne église romane, avant 1840, devait en posséder quelques une, entre autres celle de Saint Martin, patron de la paroisse et celle de Marie, achetée en 1820 (125 francs).

En 1841, le curé achète Saint Abdon (5 francs) à la paroisse d’Avenas.

En 1843 il achète la statue de Saint Roch (100 francs).

En 1854, lorsqu’on installe les deux petits autels latéraux suite à l’élargissement de l’église dédiés à saint Martin et à Marie, on décide de disposer des arcades du même style dans le chœur, au dessus de la boiserie qui vient d’être déposée.

Deux petites histoires de statues :

  • La statue de Saint Abdon vient d’Avenas où il était le patron de la paroisse. Ce prince persan est souvent présent dans les églises où il est question de sources. L’église d’Avenas possédait une source connue de très loin pour guérir certains maux, entre autres la cécité (comme celle de Saint Rigaud). Encore au XIXème siècle, il y avait affluence à cette source pour la fête patronale. Cette pratique a t elle été jugée trop superstitieuse par le curé qui la supprime et met la paroisse sous le le vocable de Marie? Il fait alors disparaître la statue de Saint Abdon pour la grade joie du curé de Vauxrenard !
  • La statue de Saint Roch est achetée en 1843. Cette année là, le curé demande à son évêque de relever sa paroisse du vœux d’aller en pèlerinage tous les 16 août à la chapelle Saint Roch de Chiroubles. Cette chapelle construite en 1829 suite à la grande peste de 1828 était le point de chute d’un pèlerinage régional pour demander à Saint Roch protection contre la peste. Ce rassemblement donnait lui aussi lieu à une fête populaire pas tout à fait du goût de notre curé, qui promet à son évêque d’organiser dans son église et pour ses paroissiens les dévotions qu’il jugera bon.

Les vitraux

Depuis de nombreuses années le conseil municipal de Vauxrenard envisageait un travail de remise en état ou de remplacement des vitraux de cette église. Les travaux intérieurs (2003-2004) ont éveillé chez les commanditaires : le maire Henri Léos et les deux adjoints: Patrick Lebourlay et Jean-Luc Prothet le désir de trouver un projet original et en même temps une œuvre porteuse de sens.

Les vitraux ont été mis en place en 2008. Ils ont été réalisés par Rachid Ben Lathoucine de l’atelier Ombres et Lumières en Brionnais. Une vingtaine de personnes de la paroisse, rassemblées par Abel Canard, s’est réunit pour « donner un cadre au projet et l’ancrer dans le passé commun tout en étant attentif aux multiples façon d’entrer dans une église aujourd’hui – spirituelle, curieuse, émotionnelle, historique, touristique… Ma volonté était de ne pas cacher notre passage dans cette église batie au XIème siècle, remaniée au XIXème et restaurée de façon totalement neutre en toute fin du XXème siècle…  » (Jean-Luc Prothet).

Au lieu de retenir la technique classique de morceaux de verre assemblés avec du plomb, l’artiste s’est proposé de fondre sur de grandes plaques de verre épais, de fines découpes de couleurs créant une œuvre originale très lumineuse.

Inscription au patrimoine

Le clocher et l’abside ont été inscrits au patrimoine par arrêté du 17 avril 1952. Voir le site Monumentum avec en complément de très belles photos.

Selon les informations du Ministère de la Culture sont inscrits au patrimoine les éléments suivants de l’église de Vauxrenard : le confessionnal, le tableau de Saint Martin, les statues de Saint Labre, Sainte Philomène, Saint-François d’Assise, Saint Vincent, Sainte Foy, Saint Joseph, Saint Abdon et Saint Roch, ainsi que les quatre lustres de l’église.

Sources :